Quels sont les avantages patrimoniaux et fiscaux de créer une SPFPL (société de participation financière des professions libérales) ?

Quels sont les avantages patrimoniaux et fiscaux de créer une SPFPL (société de participation financière des professions libérales) ?

SPFPL : Définition et évolution au plan juridique

Les structures d’exercice pour les professions libérales réglementées se sont développées ces trente dernières années afin de mieux s’adapter aux besoins des professionnels libéraux et du monde des affaires.

De la société d’exercice à la holding patrimoniale

Au-delà des structures traditionnelles (exercice individuel ou au sein d’une société civile professionnelle), il a tout d’abord été offert aux libéraux la possibilité d’exercer leur profession réglementée au sein de sociétés commerciales (SELARL, SELAFA, SELAS), structures d’exercice jusque-là interdites (Loi MURCEF n° 90-1258 du 31 décembre 1990).

Le législateur est même allé plus loin en créant les sociétés de participation financière des professions libérales (SPFPL) qui permettent non pas d’exercer une profession réglementée mais de concentrer des participations dans des sociétés d’exercice au sein d’une société holding et ainsi, de favoriser l’exercice en groupe (Loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990).

Les SPFPL prennent la forme de SA, SARL, SAS, ou de sociétés en commandite par actions. Le capital et les droits de vote d’une SPFPL doivent être détenus à plus de 50 % par des personnes qui exercent l’une des professions exercées par la ou les sociétés faisant l’objet d’une prise de participation.

Si l’objectif de la SPFPL est de permettre les regroupements de cabinets, dans des stratégies purement capitalistiques, elle offre un autre avantage : la SPFPL peut ouvrir son capital pour attirer de nouveaux investisseurs. Toutefois, une limite a été posée par la loi qui l’a créée : cette holding ne peut détenir que des sociétés exerçant la même profession (SPFPL monoprofessionnelles).


Evolution des SPFPL depuis 1990

La loi qui a institué la SPFPL a prévu que des décrets d’application, propres à chaque profession réglementée, devraient définir les modalités de création des SPFPL en fonction des particularismes de chaque profession. En pratique, peu de décrets ont été adoptés, laissant aux ordres professionnels le soin d’instruire les demandes de création de ce type de société.

La Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil (“Directive Services ») du 12 décembre 2006 a posé le principe de la la suppression de toutes restrictions relatives aux activités pluridisciplinaires : “Les Etats membres veillent à ce que les prestataires ne soient pas soumis à des exigences qui les obligent à exercer exclusivement une activité spécifique ou qui limitent l’exercice conjoint ou en partenariat d’activités différentes” (art. 25).

Depuis l’adoption de cette directive, deux évolutions majeures ont été apportées à la SPFPL en France.

La loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées a levé l’interdiction de l’interprofessionnalité.

Elle a en effet prévu que les sociétés de participations financières de professions libérales peuvent être des groupes pluriprofessionnelsayant pour objet l’exercice de deux ou plusieurs des professions d’avocat, de notaire, d’huissier de justice, de commissaire-priseur judiciaire, d’expert-comptable, de commissaire aux comptes ou de conseil en propriété industrielle ainsi que la participation à tout groupement de droit étranger ayant pour objet l’exercice de l’une ou de plusieurs de ces professions” (art. 32).

La SPFPL peut ainsi regrouper des participations dans des sociétés d’exercice constituées pour les professions juridiques et judiciaires suivantes : 

  • Avocat, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation,
  • Notaire, 
  • Commissaire de justice (profession résultant de la fusion des huissiers de justice et des commissaires-priseurs), 
  • Expert-comptable, 
  • Commissaires aux comptes,
  • Conseil en propriété industrielle,
  • Mandataire judiciaire.

NB : A compter du 1er septembre 2024, les géomètres-experts seront ajoutés à cette liste.

En revanche, toute activité étrangère à l’exercice de l’une de ces professions reste exclue.

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L’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 réforme une nouvelle fois l’exercice en société des professions libérales réglementées. Elle entrera en vigueur le 1er septembre 2024.

Cette ordonnance a été prise en application de la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante qui avait confié au Gouvernement le soin de prendre une ordonnance pour simplifier, clarifier, rendre plus lisibles les règles communes applicables aux professions libérales réglementées. 

L’ordonnance de 2023 abroge la loi MURCEF du 31 décembre 1990 qui avait institué la SPFPL et lui consacre son livre V (articles 110 à 128) à droit quasi constant.  Deux évolutions majeures sont néanmoins à noter. 

Afin de favoriser le développement économique des entreprises libérales, le périmètre des participations des SPFPL est élargi.

La SPFPL a désormais la possibilité de détenir, gérer et administrer tous biens et droits immobiliers :

sous réserve que ces activités soient destinées exclusivement au fonctionnement des sociétés ou groupements dans lesquels elles détiennent des participations. Sous cette réserve, elles peuvent notamment détenir des parts sociales ou actions de toute société à forme civile ou commerciale aux seules fins d’acquérir et d’administrer des immeubles” (art. 110).

La structuration actuelle de l’immobilier d’entreprise, logé dans des sociétés distinctes de la société d’exercice, n’est plus exclue du champ des participations des SPFPL. 

La SPFPL peut donc détenir l’immobilier des sociétés du groupe ou des sociétés qui détiennent elles-mêmes ce patrimoine.

Jusqu’à présent, les SPFPL ne pouvaient investir que dans des sociétés d’exercice de professions réglementées listées par la loi (avocat, notaire, expert-comptable…). 

En outre, les SPFPL monoprofessionnelles ne pouvaient investir que dans des sociétés d’exercice libéral (SEL) sauf si les filiales de la SPFPL exerçaient la même profession juridique ou judiciaire, dans ce cas, elles pouvaient être constituées sous n’importe quelle forme juridique.  Avec l’évolution récente du périmètre d’activité de certaines professions réglementées, les SPFPL pouvaient se trouver dans une impasse…

L’ordonnance du 8 février 2023 ouvre la possibilité à un décret d’autoriser une SPFPL de professions juridiques et judiciaires “à détenir des parts ou actions de sociétés commerciales, sous réserve que l’objet de ces dernières soit la réalisation de toute activité que les professionnels détenant la société de participations financières libérales sont autorisés à exercer conformément aux règles applicables à chacune des professions” (art. 110). 

On attendra avec intérêt le décret d’application pour connaître le périmètre exact de cette avancée significative.

En outre, les SPFPL pourront détenir des titres de sociétés d’exercice, quelle qu’en soit la forme, y compris les sociétés de droit commun visées par l’énumération contenue sous l’alinéa 4 de l’article 110 (SARL, SA, SAS et SCA), dès lors qu’elles auront pour objet l’exercice de professions libérales réglementées (et plus seulement juridiques ou judiciaires). Les SPFPL pourront être l’actionnaire unique d’une SEL sans qu’un associé en industrie ne soit nécessaire.

Avantages et inconvénients des SPFPL

Exonération de la plus-value d’apport

Lorsque des professionnels décident de créer une SPFPL, ils lui apportent les titres qu’ils détiennent dans une société d’exercice et reçoivent en contrepartie des titres de la SPFPL.

AVANT APPORT

APRES APPORT

Lors de l’apport de ses titres, le professionnel réalise une plus-value égale à la différence entre la valeur réelle des titres au moment de l’apport et leur valeur d’acquisition. 

Il est possible de bénéficier soit d’un report d’imposition (CGI, art. 150-0 B ter) s’il contrôle la société holding ou d’un sursis d’imposition (CGI, art. 150-0 B) dans le cas contraire. Dans les deux cas, le paiement de l’impôt sur la plus-value d’apport est reporté à une date ultérieure. 


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Régime fiscal de la SPFPL

Étant une société de capitaux, la SPFPL est nécessairement soumise à l’impôt sur les sociétés. Son bénéfice imposable est taxable : 

  • au taux réduit de 15 % jusqu’à 42 500 € de bénéfice, 
  • et à 25 % pour le surplus (CGI, art. 219).

Remarque : Le taux réduit de 15 % s’applique si la société est détenue à au moins 75 % par des personnes physiques et si son chiffre d’affaires n’excède pas 10 millions d’euros.

Le bénéfice de la SPFPL est essentiellement constitué par les dividendes versés par ses filiales (sociétés d’exercice). 

En France, la fiscalité des dividendes est particulièrement attractive en raison de l’application du régime mère-fille prévu par les articles 145 et 216 du CGI. Son principe est simple : si une société détient au moins 5 % des titres d’une autre société soumise à l’impôt sur les sociétés et qu’elle s’engage à les conserver pendant au moins 2 ans, le dividende encaissé est exonéré d’impôt sur les sociétés à hauteur de 95 % de son montant. Seule une quote-part de 5 % représentative des frais et charges reste taxable.

Exemple : En 2024, une SPFPL encaisse 1 000 000 € de dividendes de ses filiales toutes détenues à plus de 5 %. 

Résultat comptable : 1 000 000 €
Résultat fiscal : 50 000 € (5 % x 1 000 000 €)
Impôt sur les sociétés : 8 250 €  [ taux réduit sur les premiers 42 500 € de bénéfice et 25 % pour le surplus : (42 500 x 15 %) + (7 500 x 25 %) ]
Taux d’imposition effectif : 0,825 %  

Une SPFPL peut constituer avec ses filiales un groupe d’intégration fiscale (CGI, art. 223 A et s.) qui permet de compenser, au titre d’un exercice, les résultats fiscaux bénéficiaires et déficitaires de toutes les sociétés membres du groupe pour n’imposer à l’impôt sur les sociétés que le résultat net d’ensemble.

En outre, certaines opérations intragroupes sont neutralisées (la quote-part de frais et charges taxable sur dividendes est réduite de 5 % à 1 % si la filiale fait partie du groupe fiscal).

L’intérêt de l’option pour ce régime est essentiellement financier puisque le déficit d’une filiale pourra être imputé sur les bénéfices du groupe dès son exercice de réalisation, ce qui améliorera la trésorerie globale.

Exemple : Une SPFPL a un groupe d’intégration fiscale avec deux filiales détenues à 100 %, chacune réalise les résultats suivants : 

SPFPLFiliale AFiliale B
Résultat comptable100 000 €250 000 €– 30 000 €
Résultat fiscal20 000 €250 000 €– 30 000 €
Résultat d’ensemble240 000 €
Impôt sur les sociétés55 750 € (1)
L’impôt se décompose entre 6 375 € au taux réduit de 15 % et 49 375 € au taux normal de 25 %.

Hors intégration fiscale, l’impôt global aurait été 62 750 €.

SPFPLFiliale AFiliale B
Résultat comptable100 000 €250 000 €-30 000 €
Résultat fiscal30 000 € (1)250 000 €-30 000 €
Impôt sur les sociétés4 500 €58 250 €0
La quote-part de frais et charge sur dividende taxable est par hypothèse plus élevée hors intégration fiscale.L’impôt se décompose entre 6 375 € au taux réduit de 15 % et 49 375 € au taux normal de 25 %.

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Comme toute holding financière, une SPFPL est autorisée à déduire les intérêts des emprunts contractés pour l’acquisition des titres de ses filiales. Elle bénéficie ainsi d’un vrai effet de levier fiscal, surtout s’il est couplé avec le régime de l’intégration fiscale. En effet, grâce à la compensation des résultats qu’autorise l’intégration fiscale, les intérêts d’emprunt de la SPFPL sont déduits des résultats opérationnels sous certaines limites (règles de sous-capitalisation prévues par l’article 212 du CGI).

En conclusion, la SPFPL est un instrument juridique qui facilite l’exercice en groupe et procure de nombreux avantages aux professions libérales, notamment au plan fiscal. Son utilisation reste toutefois complexe et implique une réelle connaissance de son fonctionnement.

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