Les droits de succession entre époux

Depuis la réforme du droit des successions de 2001, le conjoint survivant est un véritable héritier de son époux. Lors du règlement de la succession, à quoi peut-il prétendre et à combien se montent les droits de succession à acquitter ? Existe-t-il des exonérations ou réductions sur le montant à régler ? Est-il possible de le protéger efficacement s’il existe des enfants issus ou non du couple ?

Quels sont les droits du conjoint survivant en matière de succession ?

Au décès d’un époux, son conjoint non divorcé et non séparé a droit à une part dans la succession. Cette part dépend des autres héritiers présents (enfants, parents, frères et sœurs) et des dispositions testamentaires que le défunt a pu prendre à son égard. Plusieurs situations sont à distinguer.

Conjoint survivant et présence d’enfants nés de l’union avec le défunt

Si le défunt laisse des enfants nés de son union avec son conjoint survivant, ce dernier a le choix entre deux options :

  • l’usufruit de la totalité des biens du défunt,
  • ou la pleine propriété du quart.

Dans le premier cas, l’époux survivant a la jouissance de l’intégralité des biens du défunt, c’est-à-dire qu’il peut les utiliser et en percevoir les revenus (cas d’un logement mis en location par exemple), mais sans pouvoir les vendre, les léguer ou les donner, puisqu’il n’en est pas le propriétaire.

Dans le second cas, il peut disposer comme il le souhaite du patrimoine recueilli mais sa part est limitée au quart.

Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise solution, chacune des deux options présente des avantages et des inconvénients, le choix final dépendra de la situation du conjoint et de la composition du patrimoine. Si le patrimoine transmis est composé de biens donnés en location ou de portefeuilles d’actions, et que les revenus du conjoint survivant sont limités, l’option pour l’usufruit lui permettra de continuer à percevoir l’intégralité des revenus. L’usufruit peut également être converti en rente viagère ou en capital, si les autres héritiers donnent leur accord.

Sur les notions d’usufruit et de nue-propriété, vous pouvez lire notre article “En quoi consiste le démembrement de l’usufruit et de la nue-propriété ?”.

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Conjoint survivant et présence d’enfants d’une autre union

Si le défunt laisse d’autres enfants que ceux du couple, le conjoint survivant recueille obligatoirement la pleine propriété du quart des biens du défunt.

Conjoint survivant et absence de descendant

Si le défunt ne laisse pas d’enfant et qu’il a toujours ses père et mère, le conjoint survivant a droit à la moitié des biens du défunt, et ses beaux-parents l’autre moitié à raison d’un quart chacun.

Conjoint survivant et présence d’un seul ascendant

Si le défunt ne laisse que son père ou sa mère, le conjoint survivant reçoit alors la pleine propriété des trois-quarts des biens, et le parent survivant récupère le quart restant.

Conjoint survivant et l’absence de descendant et d’ascendant

Si le défunt n’a ni enfant, ni petit-enfant, ni père ni mère, le conjoint survivant hérite de la totalité de la succession. Une exception toutefois pour les biens que le défunt a reçus de ses propres parents ou grands-parents par donation ou succession : la moitié des biens reviendra aux frères et sœurs du défunt ou à leurs enfants ou petits-enfants.

Remarque : Les règles énoncées ici ne valent qu’en l’absence de testament de la part du défunt, la quotité disponible peut être attribuée librement par le défunt à la personne de son choix, ce qui peut réduire la part revenant au conjoint.

Les droits reconnus au conjoint survivant sur la résidence principale du couple

Il faut enfin noter que dans tous les cas depuis 2001, le conjoint survivant dispose de droits sur le logement que le couple occupait à titre de résidence principale. Avant cette date, les enfants pouvaient mettre en vente le logement de leurs parents et les conjoints pouvaient se retrouver en situation de précarité sans aucune protection. Le conjoint survivant a désormais :

  • un droit à la jouissance gratuite du logement occupé à titre de résidence principale et du mobilier le garnissant pendant un an à compter du décès. Si la résidence principale est prise en location, les loyers sont à la charge de la succession. Cette mesure permet de laisser le temps à la succession de s’organiser et de réaliser toutes les formalités légales requises ;
  • sauf disposition testamentaire contraire, un droit d’habitation sur le logement ainsi qu’un droit d’usage sur le mobilier le garnissant, jusqu’à son propre décès (droit viager).

Ces droits lui sont accordés même s’ils excèdent la part lui revenant légalement, et même si la succession du défunt est composée de ce seul logement.

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De quoi est composé le patrimoine du défunt ?

Au moment du décès, quels biens entre dans la succession pour être partagés entre les héritiers ? Pour répondre à cette question, il faut s’intéresser au régime matrimonial du couple. Il en existe trois en France.

Régime de la communauté réduite aux acquêts

Le régime légal de la communauté réduite aux acquêts s’applique de plein droit en l’absence de contrat de mariage. La succession de l’époux décédé est composée de ses biens personnels (biens acquis avant le mariage ou reçus par donation ou succession) et de la moitié des biens acquis en commun avec son conjoint pendant la durée du mariage.

Au décès, il faut tout d’abord procéder à la liquidation de la communauté pour déterminer le patrimoine successoral. Le conjoint survivant récupère la moitié des biens de la communauté et a droit à une part sur tous les biens du défunt.

Régime de la communauté universelle

Sous le régime de la communauté universelle, la totalité des biens des deux époux ont été mis en commun, qu’ils aient été acquis antérieurement ou durant le mariage. Il y a alors création d’un patrimoine unique entre les conjoints. Au décès de l’un des époux, l’ensemble du patrimoine commun est partagé en deux parts égales, une moitié revenant au conjoint survivant, et la seconde constituant le patrimoine successoral devant être partagé entre le conjoint survivant et les héritiers du défunt.

Régime de la séparation de biens

Dernier régime matrimonial, moins favorable au conjoint survivant que les deux précédents : le régime de la séparation de biens. Ce régime ne crée aucun patrimoine commun entre les époux, chacun restant propriétaire de ses biens qu’ils soient acquis avant ou pendant le mariage. Lors du décès de l’un des époux, les droits de l’autre ne porteront que sur les biens propres du défunt qu’il devra partager avec les autres héritiers.

Le cas particulier de la clause d’attribution intégrale au conjoint survivant

Les couples qui adoptent la communauté universelle prévoient souvent une clause d’attribution intégrale au conjoint survivant. Cette exception à la réserve héréditaire entraîne la transmission de la totalité du patrimoine du couple au survivant, sans que les héritiers ne puissent prétendre à aucun droit.

Les autres clauses pouvant impacter la détermination de l’actif successoral

Des clauses contractuelles adoptées par les époux au cours de leur vie commune peuvent renforcer les droits du survivant telles que la société d’acquêts ou la clause de préciput. La première crée une catégorie de biens communs qui reviennent pour moitié au conjoint survivant. La seconde permet d’attribuer au conjoint survivant la propriété d’un bien en particulier (un logement, un contrat d’assurance-vie par exemple).

La clause la plus connue entre époux est la tontine (ou pacte tontinier). Cette clause est insérée dans l’acte d’achat d’un bien immobilier (tontine immobilière) ou dans un contrat d’assurance (tontine financière) et permet de garantir au conjoint survivant la propriété intégrale du bien ou des fonds. Les autres héritiers n’ont aucun droit sur le bien qui est réputé avoir appartenu dès l’origine au conjoint survivant.

Une dernière technique pour améliorer les droits du conjoint survivant est la donation au dernier vivant. Ce type de donation peut être envisagé quel que soit le régime matrimonial existant entre les époux. Elle permet d’augmenter la part d’héritage du conjoint survivant et présente un intérêt réel même en l’absence d’enfant (elle permet dans ce cas de lui attribuer la totalité de la succession).

Quels sont les droits de succession sur la part d’héritage revenant au conjoint survivant ?

Depuis la réforme des droits de succession, le conjoint qui hérite de son époux est totalement exonéré de droits de succession. Cette exonération s’applique quelle que soit sa part d’héritage, et même lorsqu’il reçoit plus que sa part légale en raison de ses droits sur le logement.

Le conjoint recueille ainsi toujours la totalité du patrimoine qui lui est transmis sans verser aucun droit à l’administration fiscale.

Lorsque le défunt avait souscrit un contrat d’assurance-vie et désigné son conjoint dans la clause bénéficiaire, le capital est récupéré lors du décès de l’assuré sans entrer dans l’actif successoral et ne supporte aucune fiscalité. Le recours à l’assurance peut être un excellent moyen de protéger son conjoint lorsque le couple est marié sous le régime de la séparation de biens ou de la communauté réduite aux acquêts.

On notera que la situation du partenaire de PACS en matière de droits de succession n’est pas similaire. Les partenaires de PACS ne sont pas héritiers l’un de l’autre. Au décès de l’un des partenaires, le survivant n’a droit à rien, sauf si un testament a été établi en sa faveur. Dans ce cas, il est totalement exonéré de droit de succession sur les biens qui lui sont légués.

Le concubin survivant (c’est-à-dire la personne qui partageait la vie du défunt sans être ni mariée, ni pacsée avec lui) se trouve dans une situation encore plus défavorable. Il n’est jamais héritier et si un testament est établi en sa faveur, les droits de succession s’élèvent à 60 % de la valeur du legs, après déduction d’un abattement de 1 594 €.