Comment effectuer une cession de fonds de commerce ?

Céder le fonds de commerce de son entreprise est une décision de gestion importante qui ne s’improvise pas. Elle doit être bien préparée en amont pour assurer la continuité de l’activité et en retirer le meilleur prix.

Vendre son fonds de commerce, qu’est-ce que c’est ?

Céder un fonds de commerce revient à vendre l’ensemble des éléments affectés à l’exercice d’une activité commerciale : 

  • les éléments corporels tout d’abord : matériel, mobilier, machines, outillage, véhicules professionnels…
  • et les éléments incorporels ou immatériels : clientèle, enseigne, droit au bail, …. 

La clientèle est l’élément essentiel du fonds de commerce, sans elle le fonds n’existerait pas. Aussi, elle est nécessairement transmise en cas de cession du fonds de commerce.

Les activités commerciales s’entendent des activités d’achat/revente de biens meubles ou immeubles, et certaines activités de services (hôtels, restaurants, transports, locations…).

La vente d’un fonds de commerce est soumise aux règles générales de la vente, mais aussi à des règles particulières qui ont pour but de protéger l’acquéreur, le vendeur et les créanciers du vendeur. 

Alors comment procéder pour vendre son fonds de commerce ?

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Préparer l’opération

Pour bien préparer la vente de son fonds de commerce, il convient de respecter certaines étapes :

  • faire le diagnostic de son entreprise
  • préparer des prévisionnels

Faire le diagnostic de son entreprise

La première étape dans la vente d’une entreprise consiste à faire son diagnostic pour en connaître les forces et les faiblesses. Le chef d’entreprise doit recenser un certain nombre d’informations et de documents, puis réaliser des diagnostics.

Les documents à réunir

Les documents juridiques à réunir dans le cadre de la cession de fonds de commerce sont assez nombreux :

  • extrait K-bis (commerçant) ou extrait D1 (artisans) ou avis d’inscription au répertoire SIRENE ; 
  • contrats de l’entreprise : contrat de bail, contrats commerciaux, contrats de travail, conditions générales de vente avec les clients, licences de logiciels, licences de marque…
  • concernant le local professionnel, le bail commercial qui précise certaines informations importantes comme la durée en cours, les activités autorisées, le loyer, l’index de réévaluation du loyer…

Certaines activités nécessitent d’autres documents. Par exemple, dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce de restaurant, la licence III ou IV devra être fournie.

S’agissant des documents comptables et financiers :

  • les bilans, comptes de résultat et annexes comptables des 3 derniers exercices,
  • la liste des immobilisations et des amortissements,
  • les extraits de comptes bancaires,
  • les prêts en cours avec les échéanciers,
  • l’état des dettes fournisseurs,
  • les dettes sociales et fiscales.

Les diagnostics

Une fois ces documents réunis, le chef d’entreprise doit identifier les points forts et les faiblesses de son activité. Il va réaliser pour cela un certain nombre de diagnostics seul ou avec l’aide de professionnels (expert-comptable, avocat, notaire, agent immobilier…).

  • Le diagnostic de l’activité  permet d’évaluer le marché sur lequel intervient l’entreprise, la concurrence, les perspectives d’évolution. Il est primordial pour le repreneur. La typologie des clients doit être étudiée (B2B ou B2C) ainsi que leur répartition géographique et le processus commercial de la prise de contact avec le prospect jusqu’à la réalisation de la vente ou de la prestation.
    Côté approvisionnements, vous devrez également être exhaustif en listant vos principaux fournisseurs, vos conditions d’achat, les salariés en charge de cette fonction…
  •  Le diagnostic des moyens (actifs incorporels et corporels, stocks) afin d’évaluer les moyens dont dispose l’entreprise pour gérer l’activité qui va être cédée.
  • Le diagnostic humain permet de lister les missions de chacun des salariés au sein de l’entreprise et d’évaluer l’impact du départ du dirigeant sur l’activité. Vous pourrez fournir un organigramme de l’entreprise à l’acquéreur avec les renseignements principaux pour chaque salarié (type de contrat, compétences, rémunération, …).
  • Le diagnostic financier qui permet d’analyser la situation financière de l’entreprise (prêt, encours, besoin de fonds de roulement…) ainsi que sa rentabilité. 
  • Le diagnostic juridique est un diagnostic important lorsque l’activité est réglementée ou soumise à une législation complexe. Les engagements de l’entreprise sont également listés (baux, assurances, contrats de prêt…). 
  • Le diagnostic QSE (qualité, sécurité, environnement) aide à vérifier que l’entreprise est en phase avec ses obligations sur le plan environnemental et sécuritaire (clients, salariés).

Préparer les prévisionnels

Les prévisionnels doivent permettre au repreneur potentiel de se projeter dans le futur et savoir si le montage de reprise qu’il envisage est viable.

Vous pouvez commencer par  présenter le chiffre d’affaires, sa répartition par produit ou par activité si vous en avez plusieurs. Par exemple, pour la vente d’un restaurant, vous pouvez scinder la restauration sur place et les ventes à emporter. L’évolution du CA sur plusieurs années est également un élément pertinent. 

Dans un second temps, vous allez fournir les indicateurs financiers importants liés à votre activité : marge commerciale, valeur ajoutée, excédent brut d’exploitation, rentabilité, besoin de fonds de roulement. Ces indicateurs seront accompagnés des états financiers de l’entreprise (bilan, compte de résultat et annexe comptable).

Enfin, vous pourrez fournir au repreneur un business plan qui comportera : 

  • le compte de résultat prévisionnel (qui déterminera notamment le seuil de rentabilité de l’activité, point d’équilibre entre les charges et les produits générés par l’activité),
  • le plan de financement prévisionnel sur 3 ou 5 années, 
  • et le plan de trésorerie qui montrera au repreneur comment l’entreprise fonctionnera dès la reprise du fonds, mois par mois. 

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Valoriser son fonds de commerce

Lors d’un projet de cession de son fonds de commerce, l’évaluation du fonds est réalisée dans la continuité de la phase de diagnostic. Elle permet d’aller plus loin en  déterminant précisément la valeur économique du fonds de commerce, c’est-à-dire le prix auquel le repreneur est prêt à le racheter  et le cédant à le vendre.

Quelles sont les méthodes d’évaluation ?

Il n’existe pas de méthode type mais plusieurs méthodes pour évaluer un fonds de commerce. Le choix de l’une ou de l’autre dépend du secteur d’activité et de sa maturité, de la taille de l’entreprise, des éléments cédés avec le fonds… Les diagnostics et les prévisionnels réalisés en phase de préparation permettront d’affiner l’évaluation économique.

On distingue trois grandes méthodes d’évaluation : 

  • la méthode patrimoniale : Cette méthode est assez simple à réaliser. On évalue les actifs transmis pour leur valeur réelle et on soustrait les dettes transmises, pour aboutir à un actif net.
  • la méthode de rendement : Cette méthode vise à estimer les bénéfices futurs qui seront générés par le fonds, corrigés des risques.
  • la méthode comparative : Cette méthode consiste à comparer la valeur du fonds avec celle d’autres fonds pour lesquels des transactions sont connues.

Il est conseillé d’utiliser plusieurs méthodes afin d’arriver à l’évaluation la plus juste du fonds de commerce.  Cet exercice ne permet pas de fixer un prix exact mais plutôt de déterminer une base de négociation avec les potentiels repreneurs.

Pour aller plus loin sur les méthodes d’évaluation, lisez notre article “Comment évaluer une entreprise ?

Qui peut vous assister pour évaluer votre fonds de commerce ?

Pour évaluer votre fonds de commerce, vous pouvez vous faire assister par différents professionnels

  • les conseils spécialisés : agent immobilier, syndicat professionnel, notaire…
  • les réseaux d’accompagnement : chambres de commerce et d’industrie (CCI) ou chambres des métiers et de l’artisanat (CMA), Club des arts et métiers (CLENAM), …
  • un expert-comptable, un banquier.

BPI France propose sur son site internet de vous aider à trouver le bon interlocuteur selon votre localisation pour vous informer ou vous accompagner dans votre projet de cession.

Conclure la transaction

Une fois les négociations terminées, vous devez conclure la transaction avec le repreneur.

Les formalités préalables à la vente

La cession d’un fonds de commerce est précédée de deux formalités obligatoires.

L’information des salariés

L’employeur est tenu à une obligation légale d’information des salariés dans le cadre de la vente d’un fonds de commerce dont l’objectif est de leur permettre de présenter une offre d’achat du fonds dont la vente est projetée. Dans certains cas, le droit à l’information des salariés n’est pas applicable, notamment en cas de projet de vente à un conjoint, un ascendant ou un descendant.

Une fois tous les salariés informés, la réalisation de la vente ne peut intervenir avant un délai de 2 mois sauf dans deux cas : 

  • lorsque l’entreprise a l’obligation de mettre en place un comité social et économique, dans ce cas il n’y a pas de délai spécifique (les salariés doivent être informés au plus tard au moment où le comité est saisi pour avis sur le projet de vente) ;
  • si tous les salariés ont fait part de leur décision explicite et non équivoque de ne pas présenter d’offre d’achat.

Le droit de préemption de la commune

Si le fonds de commerce est situé dans un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité, sa cession peut être soumise à un droit de préemption de la commune. 

Si vous vous trouvez dans cette situation, la vente de votre fonds doit être précédée d’une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) adressée à la commune et précisant un certain nombre d’informations.

La commune a alors 2 mois pour donner sa réponse, son silence valant renonciation tacite à l’exercice du droit de préemption.

Le contrat de vente

Un contrat écrit est recommandé

La vente d’un fonds de commerce se fait le plus souvent par écrit, même si les ventes verbales ne sont pas interdites.

Le recours à un écrit sera nécessaire lorsque des clauses particulières seront prévues telles qu’une garantie d’actif ou de passif ou un crédit-vendeur.

Souvent, l’acte de vente est précédé d’un compromis de vente, dans lequel des conditions suspensives sont prévues (obtention d’un prêt bancaire ou transfert d’une licence par exemple). Même s’il ne s’agit pas de l’acte définitif, le compromis de vente est très important puisqu’il prévoit les conditions de la vente (les éléments transmis, le prix…) qui seront reprises à l’identique dans le contrat définitif. 

Nous vous conseillons donc de vous faire accompagner par un professionnel pour la rédaction de ce compromis.

Les mentions obligatoires

Depuis 2019, il n’existe plus de mentions obligatoires dans les contrats de vente de fonds de commerce dont l’absence entrainait la nullité du contrat. Il est toutefois recommandé d’indiquer les informations suivantes pour éviter les litiges : 

  • le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition et le prix de cette acquisition pour les éléments incorporels, les marchandises et le matériel ; 
  • l’état des privilèges et nantissements grevant le fonds ;
  • le chiffre d’affaires réalisé durant les 3 exercices comptables précédant celui de la vente ; 
  • les résultats d’exploitation réalisés pendant la même période ;
  • le bail, sa date, sa durée, le nom et l’adresse du bailleur et du cédant, s’il y a lieu. 

Les obligations issues de la vente d’un fonds de commerce

Acheteur et vendeur vont être soumis à un certain nombre d’obligations.

Les obligations de l’acheteur du fonds de commerce

La première obligation de l’acheteur est bien entendu de payer le prix convenu, selon les modalités prévues avec le vendeur du fonds. Ce dernier bénéficie d’un privilège doté d’un droit de suite et d’un droit de préférence qui lui permet, en cas de non-paiement du prix, d’être payé par préférence à tous les autres créanciers nantis de l’acheteur. 

D’autres obligations peuvent être mises à la charge de l’acheteur du fonds de commerce. Par exemple, une obligation de non-concurrence peut être prévue à l’égard du vendeur pour une activité que ce dernier se réserve après la vente. 

Les obligations du vendeur du fonds de commerce

Le vendeur du fonds de commerce a l’obligation de délivrer le fonds dans le délai convenu entre les parties. Par ailleurs, il doit mettre à la disposition de l’acheteur pendant une durée de 3 ans tous les livres de comptabilité qu’il a tenus durant les 3 exercices comptables précédant celui de la vente.  

Le vendeur est aussi tenu à deux garanties vis-à-vis de l’acheteur :

  • la garantie des vices cachés ;
    Le vendeur est tenu de garantir l’acheteur contre les défauts cachés de la chose vendue qui la rendraient impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminueraient tellement cet usage que, s’il en avait eu connaissance, l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou en aurait donné un prix inférieur.
  • la garantie d’éviction.
    Cette garantie protège l’acquéreur contre les tiers mais surtout contre le vendeur, qui pourrait se réinstaller et tenter de capter la clientèle vendue.

La publicité de la vente

L’acte de vente du fonds de commerce doit faire l’objet de plusieurs publicités destinées à rendre la vente opposable aux tiers.

Enregistrement de l’acte auprès du services des impôts des entreprises

L’acte de vente doit être enregistré au service des impôts des entreprises de la situation du fonds dans un délai de 15 jours suivant la signature de la vente mais avant la publicité de la vente au BODACC.

Vous devez déposer au SIE sur place ou par courrier les éléments suivants :

  • acte de cession du fonds de commerce en 2 exemplaires
  • formulaire de déclaration de mutation de fonds de commerce en 3 exemplaires
  • formulaire de déclaration de l’état du matériel et des marchandises cédées en 3 exemplaires.

Publication dans un journal d’annonces légales

La vente du fonds doit faire l’objet d’une publication dans un journal habilité à recevoir des annonces légales dans le département dans lequel le fonds est exploité. La publication doit intervenir dans les 15 jours suivant la cession. 

Publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC)

Une publication doit également être réalisée au BODACC avec les informations suivantes :

  • les références de l’enregistrement de l’acte au service des impôts, 
  • les noms, prénoms et domiciles de l’ancien et du nouveau propriétaire, 
  • et l’indication du délai d’opposition des créanciers (V. plus loin “Le séquestre du prix de vente”). 

Déclaration à l’administration fiscale

La vente doit être déclarée à l’administration fiscale dans un délai de 45 jours à compter de sa publication dans un journal d’annonces légales. Le vendeur indique dans sa déclaration la date à laquelle elle a été ou sera effective, ainsi que, s’il y a lieu, les nom, prénoms, et adresse du cessionnaire. 

Déclaration à l’INPI

Si la cession du fonds de commerce s’accompagne de la cession des droits de propriété intellectuelle, celle-ci doit faire l’objet de certaines formalités pour être opposable aux tiers. 

  • Une cession de marque devra être publiée au registre national des marques. 
  • Une cession d’un brevet devra être publiée au registre national des brevets.

Le séquestre du prix de vente

La publicité de la vente du fonds de commerce a pour but de permettre aux créanciers du vendeur de se faire connaître et de se faire payer sur le prix de vente du fonds. Ces créanciers (fournisseur, administration fiscale, URSSAF) peuvent en effet former opposition au paiement du prix dans un délai de 10 jours à compter de la publication au BODACC. 

L’opposition doit être formée par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec AR et doit notamment énoncer le montant et les causes de la créance. 

En raison de ce droit d’opposition des créanciers, il est recommandé à l’acheteur de faire séquestrer le prix de vente. À défaut, il pourrait être tenu de payer deux fois tout ou partie du prix de cession.

Le séquestre peut être un notaire ou l’avocat de l’acheteur. Il conservera le prix pendant un délai de 105 jours à compter de la date de la vente. Les honoraires et frais du séquestre sont à la charge du repreneur, sauf si l’acte de vente prévoit une autre répartition.